"Un jeune homme est une immense force inemployée, de partout contenue, jugulée par les hommes mûrs, les vieillards. Il aspire à dominer et il est dominé; toutes les places sont prises, toutes les tribunes occupées. Il y a le jeu sans doute, et nous jetons à la jeunesse un ballon pour qu'elle se fatigue. Le jeu n'est d'ailleurs que le simulacre du divertissement essentiel: la guerre. Il y aura des guerres tant qu'il y aura des jeunes gens. Ces grandes tueries seraient-elles possibles sans leur complicité? D'anciens combattants parlent de leur martyre avec une nostalgie dont nous demeurons confondus. C'est que, dans le temps de la guerre, les vieillards veulent bien que les jeunes hommes soient des chefs. Il est inconcevable et pourtant vrai que la plupart des jeunes gens aiment Napoléon autant qu'ils l'admirent: ils se souviennent des généraux imberbes. C'était peut-être l'amour qui jetait les jeunes hommes de la Crète dans la gueule du Minotaure. Le jeunesse pardonne à celui qui l'immole, pourvu qu'il la délivre de cette force surabondante et dont elle étouffe, pourvu qu'elle agisse enfin et qu'elle domine. Les vieillards mènent le monde, et nous de saurons jamais ce que serait le gouvernement de la jeunesse. Ce qui s'appelle expérience, qu'est-ce donc? Sommes-nous, par la vie, enrichis ou appauvris? Hélas! Sainte Beuve a raison d'écrire qu'on durcit à certaines places, qu'on pourrit à d'autres mais qu'on ne mûrit pas."
François Mauriac, "Le jeune homme".
Source photo: Google Images.
Triste à en mourir, faute de pouvoir inverser la dynamique et donc de mûrir. Bof ! Je ne crois pas que l'on s'inscrive dans cette dure réalité lorsqu'on milite pour plus de justice et de dignité pour chaque être humain.
RépondreSupprimerFrançois Mauriac a écrit ces lignes en 1925 donc au sortir de la première guerre mondiale. Voir lien suivant: http://www.ltma.lu/scheerware/downloads/analyses/texteauxidees/ATjeunehomme.pdf J'ai "tilté" sur ce texte à cause de tous ces jeunes qui partent faire la guerre en Syrie. J'avais 14 ans en Mai 68. J'ai beaucoup aimé cette période. Nous voulions la paix, l'amour, d'autres rapports entre les êtres humains, les pays. Oui nous voulions plus de justice et de dignité et d'humanité. Nous avons perdu. J'ai l'impression depuis 1989 que nous passons au rouleau compresseur idéologique et que les idées de droite et d'extrême droite dominent le monde. J'espère un retour de balancier vers de nouvelles utopies de gauche. Sans passer par la case nouvelle colossale catastrophe mondiale.
RépondreSupprimerhttp://journaldeclasse.over-blog.com/article-assez-mentir-1-87967468.html
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