Lorsque nous marchons en tant que pélerin vers Saint-Jacques de Compostelle, nous avons le temps de nous poser de stupides questions du genre: "Pourquoi parvenons-nous tous à nous entendre et à vivre en harmonie sur le "Camino" (1), et pas dans le monde?"
Sur le Camino, il y a des personnes de tous les horizons, de toutes les nationalités, de toutes les langues, de toutes les cultures et de toutes les convictions. J'y ai vécu en parfaite harmonie avec les autres car chacun tenait autant compte d'autrui que de soi-même. Et cela sans efforts. Quelques exemples: nous partagions notre nourriture, nous cédions volontiers nos onguents, nos crèmes et autres pansements anti-ampoules, nous nettoyions les sanitaires après usage, nous proposions de porter une partie du sac de ceux qui peinaient, nous cédions notre lit du bas aux plus âgés dans les gîtes équipés de lits superposés. Echanges permanents, sourire rayonnants, regards complices. Tout cela coulait de source, se passait spontanément et dans la bonne humeur.
Quand la vie en commun est fluide et bouillonnante, elle est pure comme l'eau d'un torrent.
Quand nous nous cantonnons dans la mare de notre égoïsme, la vie stagne et croupit.
Que faut-il faire pour que la vie quotidienne soit également une fête de tous les instants? La vie n'est-elle pas un grand Camino où l'arrivée sera ce moment immensément important qu'est la mort? Il est crucial de nous forcer à garder notre spontanéité, à garder notre sens de l'humour, à ne pas nous laisser dévorer par des sollicitations de toutes sortes, d'éteindre notre télévision, de parler et de rire avec les autres, de nous contenter de plaisirs simples, de recevoir les amis moins formellement, de ne pas accumuler, de moins acheter car nous "portons" tout ce que nous possédons et tout marcheur sait que pour avancer librement il faut garder son sac léger; il est crucial de sourire, c'est vecteur d'énergie, de se ressourcer dans des lieux de prière, de silence et de méditation, de se retirer du monde pendant quelques jours pour régénérer.
Le pélerinage est un chemin où nous pouvons être seul ou en groupe selon notre humeur. Il faut pouvoir alterner les deux approches. Il faut apprivoiser ses larmes, ses émotions. Il faut se prendre en amitié et sourire de ses petits défauts. La vie sur le Camino est simple, très simple. Efforçons-nous dès lors de simplifier notre vie au maximum. Ne gardons que l'essentiel. Travail de tri difficile certes mais indispensable pour avancer. Soyons légers!
Soyons également accueillants par rapport aux évènements et aux autres. Beaucoup de gîtes en Espagne ont une affichette: "Le touriste exige, le pèlerin remercie". Remercions la vie pour ce que nous avons au lieu de convoiter de façon infantile ce que nous n'avons pas. Même quand il pleuvait des cordes, que le vent arrachait nos ponchos, que nos pieds glissaient en tous sens dans la boue, que les douches étaient froides le soir au gîte, nous riions et nous avions le sentiment d'une forte et belle journée.
Nous avons aucun pouvoir sur les évènements qui viennent à nous mais nous avons le pouvoir de changer notre attitude vis-à-vis de ces évènements.
Encourageons-nous les uns les autres à nous battre sans cesse pour vivre heureux. Nous le méritons!
(Témoignage d'un pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle)
(1) Camino: le chemin.
"Tout homme est pélerin sur cette terre. On n'a qu'un choix faire son possible pour dompter les évènements, accepter humblement nos impuissances, compter sur ses proches et son prochain, dans le plus grand respect, dans la discrétion, dans la présence à l'autre et donc dans le refus du replis. C'est comme ça qu'au terme de notre chemin nous aurons moins de vide devant nous !
RépondreSupprimerMi bémol.